Comment Dieu se manifeste-t-il au prophète Élie ? Quelle est la structure littéraire du texte biblique ? Comment cette structure révèle-t-elle un élément spécial ?
Le prophète Élie a donné son nom à des générations d’Hélie, d’Hély ou d’Élie. Patrick Bruel a justement composé une chanson intitulée Élie. Coïncidence ? Probablement pas.
Là, [Élie] entra dans la caverne et y passa la nuit. Et comme il était arrivé là-bas, il demeura dans la caverne. Et voici, la parole du Seigneur vint à lui et lui dit :
— Que fais-tu ici Élie ?
Mais lui répondit :
— Je me consume de zèle pour le Seigneur Dieu des armées car ils ont abandonné l'alliance du Seigneur, les fils d’Israël ; ils ont détruit tes autels, ils ont tué tes prophètes par le glaive — je suis resté moi seul et ils cherchent ma vie pour l'enlever.
Il lui dit :
— Sors, et tiens-toi sur la montagne devant le Seigneur.
Et voici que le Seigneur passe.
Un vent grand et fort déchirait renversant les montagnes, écrasant les rochers, devant Le Seigneur — le Seigneur n'était pas dans le vent.
Et après le vent, un séisme — le Seigneur n'était pas dans le séisme.
Et après le séisme, un feu — le Seigneur n'était pas dans le feu.
Et après le feu, le son d’un fin silence.
Et cela, comme Élie l'avait entendu, il couvrit son visage du manteau. Étant sorti, il se tint à l’entrée de la caverne et voici, une voix vint à lui, disant :
— Que fais-tu ici Élie ?
Et lui répondit :
— Je me consume de zèle pour le Seigneur Dieu des armées car ils ont abandonné l'alliance du Seigneur, les fils d’Israël ; ils ont détruit tes autels, ils ont tué tes prophètes par le glaive — et j'ai été abandonné moi seul et ils cherchent ma vie pour l'enlever.
Le Seigneur lui dit :
— Va, retourne sur ton chemin par le désert, à Damas, et quand tu seras parvenu, tu oindras Azahel comme roi d'Aram.
Le récit de l’épisode d’Élie au mont Horeb surprend par les répétitions qu’il contient.
Comment se fait-il que Dieu pose deux fois la même question à Élie et que celui-ci lui réponde de la même manière à chaque fois ?
Les auteurs de la Bible n’avaient pas de programmes de traitement de texte ni la possibilité de mettre en caractères gras, italiques ou surlignés les passages de leurs écrits sur lesquels ils désirent attirer notre attention. Ils orientent cependant notre lecture en structurant habilement leur texte.
Dans le récit qui nous intéresse ici, nous retrouvons deux fois la même séquence d’événements racontée avec les mêmes mots :
Ces deux séquences forment deux volets qui encadrent et du coup mettent en valeur le message central du texte, sur lequel les auteurs veulent diriger notre attention : la manifestation de Dieu.
On appelle ce procédé un « chiasme » — du mot grec khiasmos, signifiant disposition en croix, provenant de la lettre grecque X (khi), en forme de croix. Cette manière de mettre l’emphase sur un passage particulier d’un texte aide aussi à sa mémorisation. Voilà ce qui vaut bien à un passage en caractères gras, soulignés, italiques, rouges et clignotants ! Le message a le mérite d’être clair : Dieu se révèle dans le silence.
Merci infiniment à Francis Daoust, directeur général de la SOCABI qui nous a envoyé cette proposition d'éclairage du Canada !
Terminons avec l'exhortation au silence d'un évêque et ascète de Ninive, au VIIème siècle :
« Aime le silence plus que tout. Car il te donne de porter du fruit. La langue est incapable de l’expliquer. Efforçons-nous d’abord de nous taire. C’est par le silence que va naître en nous ce qui y conduira. Si tu agis ainsi, je ne saurais te dire quelle lumière se lèvera sur toi. Grand est l’homme qui, dans la patience de ses membres, s’est merveilleusement habitué à n’être plus qu’à l’intérieur de son âme.»
Isaac le Syrien, Œuvres spirituelles. Les 86 discours ascétiques : les lettres. Traduction de Jacques Touraille, Paris, Desclée de Brouwer, 1981.
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