Découvrez l’élection de l’apôtre Matthias ! Pourquoi élire un remplaçant à Judas ? Pourquoi y a-t-il un tirage au sort ?
Dans le film 12 hommes en colère, sorti en 1957, douze jurés doivent délibérer sur la culpabilité d’un accusé. Il s’agit de douze hommes avec des situations, des âges et des caractères différents.
Dans le Nouveau Testament, on trouve aussi un « collège » de douze hommes : les apôtres choisis par le Christ.
Pourquoi le chiffre 12 est-il si important dans la Bible ? Bonne question, direction les Actes des Apôtres pour en savoir plus !
Contexte : Jésus vient de « monter au ciel » (à l'Ascension). Ses disciples décident alors de retourner à Jérusalem dans une maison où ils ont l’habitude de se réunir.
Quand ils furent entrés, ils montèrent à la chambre haute où ils demeuraient : Pierre et Jean et Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques d’Alphée et Simon le Zélote et Judas de Jacques. Eux tous, ils étaient assidus ensemble à la prière avec des femmes et Marie la mère de Jésus et avec ses frères.
Et en ces jours là, Pierre, se levant au milieu des disciples, dit (car la foule des personnes, ensemble, était presque de cent vingt) :
— [...] Il faut que, parmi les hommes qui nous ont accompagnés tout le temps que le Seigneur Jésus est entré et sorti parmi nous, à partir du baptême de Jean jusqu’au jour où il a été enlevé d’auprès de nous, il y en ait un qui devienne avec nous témoin de sa résurrection.
Ils en présentèrent deux : Joseph, appelé Barsabbas, surnommé le Juste, et Matthias. Et ils firent cette prière :
— Toi, Seigneur, qui connais le cœur de tous, indique lequel de ces deux tu as choisi pour recevoir dans ce ministère de l’apostolat, la place dont Judas s’est retiré, pour s’en aller en son lieu.
Ils tirèrent au sort, et le sort tomba sur Matthias, qui fut ajouté aux onze Apôtres.
Contexte : la scène a lieu après la Résurrection et même après l’Ascension. Judas Iscariote est mort. Le club des 12 est donc devenu le club des 11 (nickel pour une équipe de foot). Les 11 apôtres de Jésus se retrouvent alors à Jérusalem.
Sans doute en vertu de son statut particulier au sein des apôtres, Pierre prend la parole. Il indique qu’il « faut » choisir un remplaçant à Judas. Pourquoi élire un remplaçant ? Pourquoi ne pas rester 11 ?
En fait, Pierre veut re-constituer ce que les évangiles appellent « les Douze ». Mais pourquoi tient-il autant à recomposer un groupe de 12 ? Eh bien pour au moins deux raisons (liées entre elles) :
Pierre prend la parole devant environ 120 disciples. Pourquoi l’auteur indique-t-il cela en donnant un nombre aussi précis ? En fait, comme souvent dans la Bible, ce chiffre est hautement symbolique.
120 = 12 x 10. Ok, and so what ? Une seconde Docteur Watson, l’interprétation arrive :
Il existe donc un premier cercle de 12 personnes, les apôtres, le cœur de l'Église, choisis directement par Jésus au début de sa mission.
Ensuite, il existe un second cercle de 120 personnes avec d'autres disciples qui ont suivi Jésus et qui recevront aussi l'Esprit Saint lors de la Pentecôte.
À ce propos, dans le judaïsme de l'époque de Jésus, il existait une tradition de « Grande assemblée » (HaKnesset HaGedolah) où 120 sages étaient responsables de transmettre et de développer l'enseignement reçu par Moïse au Sinaï.
Finalement, on peut interpréter ce nombre de 120 comme le symbole de l’unité de l'Église primitive rassemblée autour des Douze et réunie dans la prière.
On l’a dit, le club des 12 est amputé d’un membre. Pierre dresse alors le profil des candidats potentiels :
« Il faut donc que, parmi les hommes qui nous ont accompagnés tout le temps que le Seigneur Jésus est entré et sorti parmi nous, à partir du baptême de Jean jusqu’au jour où il a été enlevé d’auprès de nous, il y en ait un qui devienne avec nous témoin de sa résurrection. » (Ac 1, 21-22)
Ici, Pierre établit d’une certaine manière le portrait de ce qu’un est « apôtre » — et donc de ce qu’ils cherchent pour remplacer Judas :
Maintenant que les critères sont établis, il est temps de choisir le nouvel apôtre. La communauté en passe par trois étapes : la présentation de deux candidats qui répondent aux critères, la prière, puis le tirage au sort.
« Et ils firent cette prière : Toi, Seigneur, qui connais le cœur de tous, indique lequel de ces deux tu as choisi pour recevoir dans ce ministère de l’apostolat, la place dont Judas s’est retiré, pour s’en aller en son lieu.
Ils tirèrent au sort. » (Ac 1, 24-26)
À vrai dire, ce passage est assez étrange. Si tous les gens réunis prient... pourquoi est-ce qu'ils tirent au sort ?
L’étau se resserre. Deux hommes correspondent aux critères établis et énoncés par Pierre :
« Joseph, appelé Barsabbas, surnommé le Juste, et Matthias. » (Ac 1, 23)
Ils prient et s'en remettent à Dieu. Puis ils procèdent au tirage au sort :
« Ils tirèrent au sort, et le sort tomba sur Matthias, qui fut ajouté aux onze Apôtres. » (Ac 1, 26)
Pour conclure, finissons sur une question. Pourquoi Matthias plutôt que Joseph ? Mystère. Dieu seul le sait.
On termine par une petite réflexion de l’ami Jean Chrysostome, grand théologien et Père de l’Église du IVe siècle :
« “Alors, ils en présentèrent deux”. Et pourquoi pas un plus grand nombre ? Pour ne pas augmenter le trouble des esprits, et circonscrire l’élection. Ce n’est pas non plus sans raison que saint Luc ne place Matthias qu’au second rang ; cela prouve que souvent celui qui est prééminent devant les hommes, est bien petit devant Dieu. »
Jean Chrysostome, Œuvres complètes, Homélie III, chapitre 3, vers 382 Traduction par M. Jeannin (1865)