Dans son poème sur la Nativité, comment la naissance de Jésus est-elle décrite par le poète Ephrem le syrien ? Laissez-vous porter par la douceur des mots.
Le ténor italien Andrea Bocelli interprète le Cantique de Noël pour notre plus grand bonheur...
Il chante en français dans le texte, dans cet enregistrement live réalisé en janvier 2021 pour la BBC, à la Cathédrale Saint Paul de Londres.
Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville. Joseph aussi monta de Galilée, de la ville de Nazareth vers la Judée, vers la ville de David qui s’appelle Bethléem — parce qu’il était de la maison et de la famille de David — pour se faire inscrire avec Marie, sa fiancée, qui était enceinte.
Or, comme ils étaient là, furent accomplis les jours où elle devait enfanter. Et elle mit au monde son fils, le premier-né et elle l'emmaillota et le coucha dans une mangeoire parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans l’hôtellerie.
Dans les commentaires bibliques, les hymnes liturgiques occupent une place toute particulière. Ils exaltent de manière poétique tel ou tel aspect du mystère. En la matière, Ephrem le Syrien (306 environ – 373) est un maître.
Les chrétiens syriaques l'appellent « la harpe du Saint-Esprit » et ses hymnes ont pris place dans les liturgies syriaques. «Il est ordonné diacre, mais refusa toujours sacerdoce et épiscopat [autrement dit de devenir prêtre ou évêque], allant, selon Sozomène, jusqu’à feindre la folie.» (Olivier Clément, Sources, Notices, 2007)
La pensée d’Ephrem est toute sémitique, lyrique, biblique, faite d’images. Images qu’il faut opposer, amener à se nier réciproquement pour suggérer le caractère ineffable du mystère [ineffable : ce qui ne peut être exprimé par le langage].»
Son poème sur la naissance de Jésus qui est célébrée dans la nuit de Noël est sans doute l'un des hymnes les plus admirables (Hymne "De nativitate", 11, 6-8).
« Le Seigneur vint en elle pour se faire serviteur.
Le Verbe vint en elle
pour se taire dans son sein.
La foudre vint en elle
pour ne faire aucun bruit.
Le pasteur vint en elle
et voici l'Agneau né, qui pleure sans bruit.
Car le sein de Marie
a renversé les rôles :
Celui qui créa toutes choses
est entré en possession de celles-ci, mais pauvre.
Le Très-Haut vint en Elle (Marie),
mais il y entra humble.
La splendeur vint en elle,
mais revêtue de vêtements humbles.
Celui qui dispense toutes choses
connut la faim.
Celui qui étanche la soif de chacun
connut la soif.
Nu et dépouillé il naquit d'elle,
lui qui revêt (de beauté) toutes choses »
Et comme un poème en inspire d'autres, on conclut à nouveau en empruntant les mots du poète italien Erri De Luca, qui fait résonner la voix de Marie toute émue et émerveillée de ce qui est en train de se passer. Ici, Marie, pendant sa grossesse, commence déjà à parler à son fils :
« Je lui parle : « C’est cette lumière qui t’attend dehors. Elle ne sert pas seulement à voir loin, c’est aussi de la chaleur. Tu sens la vague qui nous recouvre tandis que nous sommes allongés ? Elle se nomme soleil. Mes yeux n’arrivent pas à le regarder, mais les tiens oui, protégés par l’eau de mon ventre. » Je lui raconte : « Plus que la jour, c’est la nuit qui t’étonnera. C’est un grand giron surchargé de lumières. Les soirs d’été, quelques-unes se détachent et viennent tout près, en sifflant. Au milieu d’elles passe une voie blanche. Telle est la nuit, une foule de mères éclairées qui se nomment étoiles : entre elles toutes, moi seule suis la tienne. Si on les regarde, elle font ouvrir grands les yeux et gonfler la respiration. C’est ce va-et-vient de la poitrine qui te berce. »
Qui sait s’il arrive à d’autres femmes enceintes de parler à leur bébé enfermé en elle. Ce qui est étrange pour moi, c’est que je crois répondre à des questions que tu me poses. Il faut vraiment que tu sortes de là, mon garçon, et que nous nous présentions. Moi, je suis Marie, et toi, qui es-tu ? »
Erri De Luca, Au nom de la mère, Paris, Gallimard, 2006.
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