Qui est Abraham, qui sont ses ancêtres et d’où vient-il ?

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Qui sont les parents d’Abraham ? Qui est sa femme ? D’où vient-il et que raconte la Bible à propos de sa famille ? Que signifie le nom « Abram » ?

4 minutes et 13 secondes avec Louis Armstrong, Elvis Presley, Caravage et du bon chocolat suisse
Dernière mise à jour -  
24/11/2023

Le blues d’Armstrong ou le swing d’Elvis pour chanter Abraham

La figure d’Abraham est gigantesque et sa popularité incontestée. Le grand Louis Armstrong ne l’a pas oublié et sait bien à qui il fait référence dans son titre Rock my Soul composé dans les années 1950. Alliant les traditions du gospel à celles du blues et du jazz, il entonne son morceau à pleine voix :

Why don't you rock my soul in the bosom of Abraham ? Oh, rock my soul !
Pourquoi ne bercez-vous pas mon âme au sein d'Abraham ? Oh, bercez mon âme !

Comme Louis Armstrong, on aimerait nous aussi être bercés dans le sein d’Abraham. Et cette image familiale nous a d'ailleurs amenés au sujet d’aujourd’hui : connaît-on les membres et l’histoire de la famille d’Abraham ? (spoil : oui, il suffit de lire le chapitre 11 de la Genèse)

Pour une version plus dansante, découvrez également la reprise d’Elvis en 1972 !

Le texte biblique qui retrace la généalogie d’Abraham

Située juste après le récit de la Tour de Babel, cette longue liste généalogique un peu rebutante est en fait très riche d’informations. Tout d’abord, elle a le don de suggérer plein d’idées pour trouver des prénoms pas piqués des hannetons. Mais elle permet également de retracer l’histoire et la généalogie d’un personnage central du livre de la Genèse : Abraham.


Telles sont les générations de Sem :

Sem, âgé de cent ans, engendra Arpakshad, deux ans après le déluge. Et Sem vécut, après avoir engendré Arpakshad, cinq cents ans et il engendra des fils et des filles.

Et Arpakshad vécut trente-cinq ans et engendra Shélah. Et Arpakshad vécut, après avoir engendré Shélah, quatre cent trois ans et il engendra des fils et des filles.

Et Shélah vécut trente ans et engendra Éber. Et Shélah vécut, après avoir engendré Éber, quatre cent trois ans et il engendra des fils et des filles.

Et Éber vécut trente-quatre ans et engendra Péleg. Et Éber vécut, après avoir engendré Péleg, quatre cent trente ans et il engendra des fils et des filles.

Et Péleg vécut trente ans et engendra Réu. Et Péleg vécut, après qu’il eut engendré Réu, deux cent neuf ans et il engendra des fils et des filles.

Et Réu vécut trente-deux ans et engendra Srûg. Et Réu vécut, après avoir engendré Serug, deux cent sept ans et il engendra des fils et des filles.

Et Serug vécut trente ans et engendra Nahor. Et Serug vécut, après avoir engendré Nahor, deux cents ans et il engendra des fils et des filles.

Et Nahor vécut vingt-neuf ans et engendra Térah. Et Nahor vécut, après avoir engendré Térah, cent dix-neuf ans et il engendra des fils et des filles.

Et Térah vécut soixante-dix ans et engendra Abram, Nahor et Harane. Et telles sont les générations de Térah : Térah engendra Abram et Nahor et Harane et Harane engendra Lot.

Et Harane mourut du vivant de Térah, son père, dans la terre de sa naissance, à Ur dans le pays des Chaldéens.

Et Abram et Nahor prirent femmes. Le nom de la femme d’Abram était Saraï et le nom de la femme de Nahor, Milka (fille d’Harane, père de Milka et père de Yiska).

Et Saraï était stérile : elle n’avait pas d’enfant.

Et Térah prit Abram, son fils, et Lot, fils de Harane, le fils de son fils et Saraï, sa belle-fille, la femme d’Abram, son fils et ils sortirent avec eux d’Ur des Chaldéens pour aller en terre de Canaan et ils vinrent jusqu’à Harane et ils habitèrent là. Et les jours de Térah furent deux cent cinq ans et Térah mourut à Harane.

Livre de la Genèse, chapitre 11, versets 10 à 32. Traduit de l’hébreu par les équipes du programme de recherches La Bible en ses Traditions.

Qui sont les membres de la famille d’Abraham ?

Michelangelo Merisi, dit Le Caravage (1571-1610), Le sacrifice d'Isaac (1603, huile sur toile, 41 x 53 cm), Galerie des Offices, Florence (Italie). Domaine public.

Pourquoi retracer une généalogie ?

Ce passage de la Genèse est souvent méconnu, et ce n’est pas le premier qui nous vient à l’esprit quand on songe à Abraham – en règle générale, on songe plutôt à ce tableau du Caravage représentant l’épisode du sacrifice de son fils Isaac. Et pourtant, Abram (plus tard renommé Abraham) apparaît dans le texte biblique pour la première fois en conclusion de cette longue généalogie.

À bien y regarder, le fait d’établir une généalogie est déjà un indice important : les auteurs bibliques retracent ainsi l’histoire familiale qui mène à un personnage capital dans l’histoire biblique. Seuls les grands personnages bénéficient de ce privilège (à l’image de Jésus dans le chapitre 1 de l’évangile de Matthieu par exemple).

Autrement dit, la seule apparition de cette généalogie indique discrètement quelque chose de fondamental : le personnage qui conclut la liste est un personnage décisif. On est prévenu (et en fait on le sait déjà), Abraham n’est pas un personnage secondaire.

József Molnár (1821-1899), Le voyage d'Abraham d'Ur à Canaan (vers 1850, huile sur toile, 112 x 130 cm), Magyar Nemzeti Galéria, Budapest (Hongrie). Domaine public.

De Sem à Térah, les ancêtres d'Abraham

Arrêtons-nous d’abord sur 2 personnages dans cette liste : Sem et Térah.

  • Sem est celui qui ouvre cette généalogie. Il est l’un des trois fils de Noé. Son nom a connu une postérité bien particulière puisque le terme « sémites » désigne tous ses descendants, c’est-à-dire tous les habitants de la région du Proche-Orient antique. À ce titre, l’hébreu et l’arabe sont ainsi appelés « langues sémitiques ».

  • Térah (*rien à voir avec l’unité de mesure qui correspond à « 10 puissance 12 ») est le père de trois fils, dont un aîné plutôt fameux : Abram, Nahor et Harane.

Père fondateur du peuple d’Israël et principal patriarche des trois religions monothéistes (judaïsme, christianisme et islam), Abraham est une méga-star dans la Bible aussi bien que dans le Coran (sous les traits d’Ibrahim). Et voici que sa généalogie nous apprend qu’il ne vient pas de Jérusalem ni d’aucune ville aux alentours, mais bien plus loin, d’un pays étranger, aux cultes polythéistes, en Mésopotamie.

Petite carte des familles réalisée par nos soins pour visualiser géographiquement l'étendue du voyage d'Abraham, depuis Ur dans l'actuelle Irak jusqu'à Harane dans l'actuelle Turquie.

Une famille marquée par la mort

« Et Harane mourut du vivant de Térah, son père, dans la terre de sa naissance, à Ur dans le pays des Chaldéens. » (Gn 11,28)

Glissée au milieu de la liste généalogique, cette rapide information nous donne en réalité 2 clés de lecture pour mieux comprendre l’ambiance et l’atmosphère qui règnent dans la famille d’Abram.

  • Tout d’abord, on apprend qu’Abram a perdu son frère Harane, mort prématurément, du vivant de son père.
  • Par ailleurs, on apprend également que la famille vient de Ur en Chaldée. Géographiquement, Ur se situe au sud-ouest de Babylone, dans la région du « croissant fertile », en Mésopotamie (Irak actuelle). Reliant cette information au texte qui précède exactement cette généalogie, on comprend donc que la famille d’Abram vit dans l’ambiance de Babylone (dont on vient tout juste de retracer l’orgueil dans les versets évoquant la Tour de Babel).

Petit bonus au passage, on découvre que la femme de Nahor (qui est également sa nièce) s’appelle Milka. Comme quoi entre la Bible et le chocolat, il n’y a parfois qu’un pas !

« Et Abram et Nahor prirent femmes. Le nom de la femme d’Abram était Saraï et le nom de la femme de Nahor, Milka. » (Gn 11, 29)
Passage obligé par les montagnes suisses pour rendre hommage au chocolat de notre enfance, dont on découvre un improbable lien avec la Bible ! Pour être honnête, le nom de l'entreprise vient de la contraction des mots allemands Milch und Kakao (« lait et cacao »). Mais libre à nous d'en faire un moyen mnémotechnique savoureux !

L'apparition d’un nouveau personnage central : Saraï

« Et Saraï était stérile : elle n’avait pas d’enfant. [...] Et Térah mourut à Harane. » (Gn 11, 30.32)

Dans cette généalogie retraçant la famille d’Abram, on vient d’apprendre que son frère Harane meurt avant son père (autrement dit meurt jeune).

Mais la tristesse et l’ambiance de mort qui entourent la famille d’Abram ne s’arrêtent pas là. Dès le verset suivant, on souligne une autre souffrance qui pèse sur la famille : la stérilité de Saraï, c’est-à-dire son empêchement de pouvoir donner la vie.

Comme nous le verrons la semaine prochaine, l’histoire d’Abraham ne peut se comprendre sans se pencher sur l’histoire de sa femme Saraï. Autrement dit : l'une des plus grandes figures de l’Ancien Testament ne doit pas faire ombre à un personnage non moins important, Saraï (ensuite renommée Sarah)

James Tissot (1836-1902), Le conseil d'Abram à Saraï (vers 1899, gouache sur carton, 12 x 21 cm), Jewish Museum of Manhattan, New York (États-Unis). Domaine public.

Le voyage d’Abraham et l'initiative de son père Térah

Comme on l’a souligné dans d’anciens numéros avec les exemples de Noé, Jacob, Moïse, Jésus ou encore Pierre, chaque nom a étymologiquement une signification dans la Bible.

En hébreu, « Abram » peut justement se traduire par « le père est élevé ». Cette précision nous laisse entendre que le père d’Abram est très important pour lui, que c’est une figure déterminante – voire envahissante. Pour grandir, il va falloir qu’Abram s’en émancipe.

Or, paradoxalement, le mouvement qui consiste à quitter sa famille et son pays n'est pas à l'initiative d'Abram mais de son père, Térah – quand bien même celui-ci s’arrête en chemin et meurt dans un village qui porte le même nom que son fils, Harane.

En effet, une partie de la famille reste sur place (Nahor, Milka et Yiska) tandis que le grand-père (Térah), le fils et sa femme (Abram et Saraï) ainsi que le neveu (Lot) sont du voyage. Ainsi se trouve lancée la grande histoire d’Abraham, qui sera racontée sur près de 13 chapitres (depuis Gn 12 jusque Gn 25).

« Et Térah prit Abram, son fils, et Lot, fils de Harane, le fils de son fils et Saraï, sa belle-fille, la femme d’Abram, son fils et ils sortirent avec eux d’Ur des Chaldéens pour aller en terre de Canaan et ils vinrent jusqu’à Harane et ils habitèrent là. [...] Et Térah mourut à Harane. » (Gn 11, 31-32)
Francesco Bassano le Jeune (1549-1592), Abraham quittant Harane (vers 1570, huile sur toile, 95 x 125 cm), Rijksmuseum, Amsterdam (Pays-Bas). Domaine public.

Le mot de la fin

L’histoire d’Abram commence dans un contexte familial de souffrance et de deuil (mort de son frère et stérilité de sa femme). Mais, comme le laisse entendre son nom, le grand défi d’Abram est de tracer sa propre histoire en quittant son père. C’est tout le défi qu’évoque feu Christian Bobin dans ce passage :

« Il y a un temps où les parents nourrissent l’enfant, et il y a un temps où ils l’empêchent de se nourrir. L’enfant est seul à pouvoir distinguer entre ces deux temps, seul à en tirer la conclusion logique : partir. Non pas lutter. Ne surtout pas lutter – partir. »

Christian Bobin, Le Très-Bas, Paris, Gallimard, 1992, p. 63

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